Le kambo est le poison qui vient de la grenouille géante ‘Phyllomedusa bicolor’ et qu’elle sécrète par la peau. Cette grenouille vit dans les hautes altitudes d’Amazonie. En raison de sa toxicité élevée, elle n’a pas à se soucier des prédateurs. Même les serpents font de grands détours pour l’éviter. L’absence de prédateurs naturels a engendré l’augmentation exponentielle de la population de cette grenouille.
Il est évidemment idiot d’ingérer les sécrétions de cette grenouille dans de grandes quantités. Cependant, en appliquant à peine quelques gouttes sur la peau après avoir écorché une partie de l’épiderme, cela peut provoquer un effet purificateur très profond.
LE RITUEL DU KAMBO
Les indiens utilisent le kambo dans leurs rituels, menés par des chamans, appelés également grands sorciers. Après que le kambo ait été appliqué sur la peau par le chaman, les participants boivent deux litres d’eau sur estomac vide. La couche supérieure de l’épiderme est ensuite brûlée avec un bâton d’encens. Le kambo est appliqué sur la brûlure et la sécrétion est ainsi directement assimilée par le flux sanguin.
Après l’application du kambo, on ressent vite une sensation de chaleur. Le sang monte à la tête et le visage prend des couleurs bleues. Une forte nausée intervient au bout de quelques minutes, et pousse le participant à vomir. Ça accélère également le rythme cardiaque et augmente la température du corps. Les participants commencent alors à transpirer et peuvent aussi avoir des frissons. Les effets jusqu’ici n’ont pas l’air très attirants. Cependant vous vous sentirez complètement revitalisé après une session de kambo, et c’est ce qui fait que la rigueur du rituel vaut le coup d’être endurée. Un rituel est en général composé de deux sessions d’affilée.
Durant la session de kambo, la plupart des chamans chante ou joue d’un instrument. Certains rituels de purification spirituelle peuvent également être impliqués, comme la combustion de paolo santo (bois saint) ou la purification de l’aura avec de grandes plumes ou feuilles de la jungle. Chaque chaman a ses propres rituels.
Tout comme les autres rituels chamaniques, la consommation rituelle du kambo a atteint le monde occidental. Pour participer à une session, vous n’avez plus besoin de parcourir un voyage épique à travers la jungle amazonienne, vous pouvez rendre visite à un chaman occidental, qui guidera la cérémonie du kambo. Il est important de noter qu’un chaman d’Amazonie a souvent derrière lui des années de pratique et qu’il voue sa vie entière à servir et guérir les autres.
Les chamans occidentaux ont tendance à être moins expérimentés. Certains s’autoproclament chamans sans avoir suivi aucune forme de formation et en ayant assisté à peine à quelques cérémonies. Malheureusement, il n’existe pas de certificat de qualité de chaman. On dira simplement que les rituels que l’on peut suivre à l’ouest sont, en général, une pâle imitation des rituels chamaniques de la zone amazonienne.
Outre la visite à un chaman, il est également possible d’acheter du kambo et de faire une session tout seul. Bien évidemment, tous les chamans vous déconseilleront de le faire sans le rituel adéquat. Mais si les rituels chamaniques n’ont pour vous pas de valeur, vous pouvez alors faire la cérémonie vous-même. L’avantage est que vous choisissez où vous voulez le faire, ainsi qu’un environnement qui vous est familier. Vous pouvez également choisir le moment où vous voudrez procéder au rituel, sans avoir besoin de vous caler sur l’emploi du temps de quelqu’un. Enfin c’est assez abordable. Votre propre session de kambo vous coûtera moins de 5 euros, alors qu’une cérémonie guidée par un chaman peut coûter jusqu’à 50 euros.
RÉCOLTER LE KAMBO
Le kambo est obtenu en capturant la grenouille géante et en grattant la sécrétion de sa peau. On trouve en général ces grenouilles près des rivières d’Amazonie. Ces ruisseaux sont appelés Igarapés par les indigènes. Quand il pleut, les grenouilles se regroupent autour de ces Igarapés et font ce bruit si particulier. Les indiens imitent le cri de la grenouille pour la leurrer et pouvoir la capturer.
Les attraper est assez facile, vu que ces grenouilles géantes n’ont pas de prédateurs naturels. Elles sont ensuite délicatement suspendues par les quatre pattes de manière à ce que leur corps prenne la forme d’un X.
Les femmes chamans massent parfois les pattes de la grenouille afin de stimuler la production de poison. La substance empoisonnée de sa peau est délicatement récoltée et déposée sur des petites assiettes plates en bambou, où le poison est laissé à sécher. Quand les indiens ont récolté assez de poison, ils libèrent la grenouille dans la nature. On prend grand soin de ne pas blesser la grenouille pendant la récupération du poison. Le kambo séché est alors mélangé à un peu de salive ou d’eau, ce qui lui donnera une apparence gélatineuse. Il peut ensuite être appliqué sur la peau par petites touches.
HISTOIRE
Les indiens ne transmettent pas leur histoire par des écrits mais ils le font oralement, en racontant des histoires. L’histoire du kambo peut seulement se partager comme une légende. D’après les indiens de Kaxinawá, une grande partie de la tribu est tombée un jour gravement malade. Leur chaman Kampu avait fait tout ce qui était en son pouvoir pour essayer de les guérir. Il essaya toutes ces herbes médicinales, consulta ces ancêtres et procéda à des rituels, mais rien n’arrivait à guérir les membres de la tribu.
Kampu s’enfonça dans la jungle sous l’influence de plantes psychoactives et invoqua le grand esprit. L’esprit lui montra comment suspendre la grenouille géante et comment récolter le liquide blanc toxique de sa peau. Le Grand Esprit lui montra ensuite comment appliquer le poison sur des brûlures de peau. Après cette révélation, Kampu se précipita vers sa tribu pour traiter les membres malades comme lui avait enseigné le Grand Esprit. Le rituel du kambo parvint à guérir ses frères et sœurs.
D’après les indiens, l’esprit de Kampu a été transmis à la grenouille géante après sa disparition, où il vit encore pour servir les indiens d’Amazonie avec ses dons de guérison. Les différentes tribus ont des noms différents pour Kampu, comme Sapo, Kambu ou Vacina da Floresta. Les rituels dispensés au cours des cérémonies varient pour chaque tribu, bien que dans la majeure partie des cas, la couche supérieure de la peau soit brûlée et retirée et que le kambo soit appliqué sur cette blessure.
Les occidentaux ont tendance à considérer ces histoires comme complètement insensées. Après tout, comment peut-on communiquer avec un esprit sous l’influence de psychédéliques ? Mais en expérimentant soi-même les effets naturels des psychédéliques, on peut changer d’avis à ce sujet. Si cette histoire est vraie, il est miraculeux que quelqu’un puisse penser à guérir quelqu’un d’autre en lui administrant un poison puissant.
Les chamans indigènes utilisent des herbes médicinales, dont la science a souvent prouvé être efficaces. Le kambo contient de nombreuses substances qui semblent avoir des effets thérapeutiques. Il est plus juste de conclure que les propriétés du kambo ne sont pas simplement basées sur la superstition.
CHIMIE
Le kambo est composé de nombreuses substances différentes, dont chacune a son propre effet sur le corps humain. Il contient un taux élevé de peptides (protéïnes), comme les familles peptides : bradykinine (Phyllokinine) Tachykinines (phyllomedusine) caeruleine, sauvagine, tryptophyllines, dermorphines, deltorphines et bombesines.
Le but de cet article n’est pas d’examiner chaque substance. La science moderne est encore très loin de connaître parfaitement chaque composant du kambo. C’est pour cette raison que nous limiterons cet article uniquement aux faits concernant le kambo scientifiquement prouvés.
EFFETS
Comme mentionné plus haut, l’application du kambo entraîne une augmentation de la température. Vous pouvez ressentir une sensation de frisson parcourir votre colonne vertébrale. Votre tête commence ensuite à chauffer. La pression sanguine de votre tête peut même devenir inconfortable, bien que certains trouvent cela particulièrement plaisant. La pression sanguine augmente également, ce qui peut rendre le visage rouge. Cette sensation peut durer un certain moment avant que vous ressentiez une très forte nausée. Si vous n’avez pas de nausées, c’est sans doute que vous n’avez pas eu suffisamment de kambo et le chaman devra en rajouter.
Un chaman qui sait ce qu’il fait continuera à appliquer le kambo par petites touches jusqu’à ce que le participant se précipite aux toilettes pour vomir. Vous continuerez à vomir jusqu’à ce que votre estomac soit vide. La première expérience du kambo peut être très effrayante. Se renseigner sur cette pratique est une chose, mais l’expérimenter est vraiment intense.
Nous sommes conscients que ce précédant paragraphe ne dépeigne pas une image si attirante, mais la raison pour endurer cette épreuve est la sensation de soulagement qui s’installera 15 minutes après et qui durera plusieurs heures. Le jour suivant vous vous sentirez plus vibrant et les pensées plus claires que jamais, et certaines gênes physiques seront réduites voire complètement dissipées. Les chamans pensent que la répétition du rituel du kambo sur plusieurs jours d’affilée peut même soigner des maux plus importants. Bien qu’il y ait de très nombreux témoignages d’utilisateurs sur la guérison d’une affection grâce au kambo, aucune preuve scientifique à ce jour ne vient confirmer ces faits.
APPLICATIONS MÉDICALES
Au jour où nous écrivons cet article, 47 articles seulement sont référencés dans les bases de données Pubmed au sujet du poison de cette grenouille. Un petit nombre d’entre eux traite des propriétés médicales du kambo, bien que la plupart de ces recherches ait été faîte in vitro sur certains composants du kambo, sur des bactéries et des cellules cancéreuses. Il n’y a pas eu de recherche sur un groupe test placebo concernant ces propriétés curatives du kambo.
Le nombre d’articles scientifiques sur le kambo est extrêmement faible, surtout si l’on considère les nombre d’articles sur l’ail qui s’élève à 4462. Une différence assez significative.
Même sans recherche approfondie, on connaît quelques effets physiques positifs du kambo :
1. L’estomac est vidé d’une façon si intense, que la bile finit par être sécrétée. Ce processus ne semble pas très sain, mais en fait ce n’est pas le cas. Le foie libère des toxines solubles dans le gras à l’intérieur de la bile, et celle-ci est dégagée dans les intestins. Quoiqu’il en soit, 90 % de la bile est absorbée par la paroi intestinale pendant le processus de digestion. Ce n’est visiblement pas très utile, puisque elle absorbe également 90 % des toxines solubles dans le gras. Comme l’estomac se débarrasse de la bile pendant une session de kambo, un taux élevé de toxines est sécrété, qui devrait normalement être réabsorbé par le corps.
Les participants sont également atteints de diarrhées. Dans ce cas, les selles traversent rapidement l’intestin et la paroi intestinale n’est pas capable d’absorber la bile. La sécrétion de bile est décuplée en comparaison à la sécrétion habituelle. Cela signifie que vous sécrétez autant de toxines solubles que vous ne l’auriez fait en dix jours. Le kambo est idéal pour la détoxification. Après quoi le foie est stimulé pour produire la bile à nouveau.
2. Les températures corporelles augmentent avec le kambo. De nombreux virus et bactéries meurent, même avec une différence de seulement un degré. L’effet est le même qu’avec un sauna.
Outre ces deux processus physiques, le kambo contient également certaines substances qui stimulent le système immunitaire, réduisent les inflammations, ont des fonctions antibactériennes et antivirales et améliorent la circulation sanguine. Ci-dessous, certains faits scientifiquement prouvés :
1. Le kambo inclut les deux peptides B2 et B3. Ces substances ont un effet antibactérien et préviennent le développement des tumeurs. Ces deux substances prometteuses doivent encore faire l’objet de recherches pour d’éventuelles traitements anti-tumeurs. En outre, d’autres études montrent qu’en plus des dermaseptines B2 et B3, le kambo contient également d’autres substances capables de réduire la croissance des tumeurs. [1][2][5]
2. Les recherches ont montré que le poison de 12 grenouilles géantes différentes contenait quatre-vingt substances antibactériennes différentes. D’autres études mettent également en évidence l’activité antibactérienne du kambo. [3] [4] [6]
3. Certains peptides du kambo agissent comme un décontractant musculaire et peuvent ainsi être utilisés pour les maladies cardiovasculaires. Ces peptides ont un fort potentiel grâce au nombre peu élevé d’effets secondaires qu’ils provoquent. [5]
4. Il a été aussi démontré que le kambo disposait de propriétés anti-inflammatoires.[5]
[6]
COMBINAISONS
Le kambo peut facilement se combiner aux autres rituels chamaniques. Il est souvent utilisé avant une cérémonie d’ayahuasca, par exemple. Dans ce cas, il y a en général deux sessions dans la journée, suivies par la cérémonie d’ayahuasca dans la soirée. La cérémonie n’en sera que bien plus puissante. De la même manière, le kambo peut être combiné à l’iboga ou à des rituels de suerie. Certains chamans ou thérapeutes occidentaux combinent le kambo à l’acupuncture, en appliquant le kambo sur ces points d’acupuncture.
DOSAGE
Le dosage change beaucoup en fonction des gens. Un chaman commence avec trois applications pour s’assurer de la réaction et déterminer la sensibilité. C’est suffisant pour certains, mais d’autres auront besoin de beaucoup plus. Les chamans considèrent qu’une personne qui a besoin de beaucoup de kambo est relativement saine / pure. Cependant, ces allégations ne peuvent pas être vérifiées de manière scientifique. Par exemple, il se peut que des gens qui vivent une vie malsaine ou qui sont malades régulièrement aient besoin d’applications plus nombreuses que des personne en pleine santé avec un mode de vie sain.
EFFETS SECONDAIRES
Comme nous l’avons évoqué plus tôt, les effets secondaires ne sont pas à prendre à la légère. Ils incluent : sudation, tremblements, nausées, crampes, vomissements et une augmentation de la température corporelle. Cependant, il faut s’attendre à ces effets secondaires lors d’un rituel de kambo, et on peut se demander s’il s’agit vraiment d'”effets secondaires”. Beaucoup pensent que ces phénomènes font partie intégrante du rituel, vu que cet inconfort physique participe à libérer l’esprit. Après le rituel, vous ressentirez une grande fatigue et un léger mal de tête, mais vous vous sentirez en général le lendemain frais comme un gardon.
RISQUES ET CONTRE-INDICATIONS
Il n’y a aucun incident connu relatif à des effets négatifs sur la santé à long terme. Cependant, l’utilisation de kambo est déconseillée aux personnes ayant reçu un organe. Lorsqu’on vous greffe un organe, on vous fait prendre des médicaments qui suppriment la défense immunitaire pour éviter tout rejet. Il n’est donc pas très sage d’utiliser le kambo, qui contrecarrera les effets de ces médicaments.
De la même manière, les gens souffrant de sévères troubles du système immunitaire, comme MS ou ALS, doivent également se montrer prudents avec le kambo. Chez ces patients, leur propre système immunitaire attaque le corps. En stimulant de système immunitaire, les défenses immunitaires peuvent s’intensifier. Cependant, il est également possible que les patients atteints de MS et de ALS se sentent mieux après une session de kambo, puisque le kambo module aussi ce système immunitaire. En cas de trouble immunitaire grave, il est recommandé d’essayer une seule fois au premier essai, d’attendre venir les effets et de définir plus tard si la session de kambo a eu un effet curatif.
Comme le kambo n’a atteint le monde occidental que très récemment, on ne trouve que peu de documentation sur cette substance. Il est ainsi sage d’écouter votre propre corps. Toute substance peut entraîner une réaction allergique, et il en est de même pour le kambo.
SOURCES
1. Zoggel H, Carpentier G, Dos Santos C, Hamma-Kourbali Y, Courty J, Amiche M, Delbé J., Antitumor and angiostatic activities of the antimicrobial peptide dermaseptin B2, PLoS One. 2012;7(9):e44351.
2. van Zoggel H, Hamma-Kourbali Y, Galanth C, Ladram A, Nicolas P, Courty J, Amiche M, Delbé J., Antitumor and angiostatic peptides from frog skin secretions, Amino Acids. 2012 Jan;42(1):385-95.
3. Amiche M, Ladram A, Nicolas P. Peptides. A consistent nomenclature of antimicrobial peptides isolated from frogs of the subfamily Phyllomedusinae. 2008 Nov;29(11):2074-82.
4. Wang L, Zhou M, McClelland A, Reilly A, Chen T, Gagliardo R, Walker B, Shaw C., Novel dermaseptin, adenoregulin and caerin homologs from the Central American red-eyed leaf frog, Agalychnis callidryas, revealed by functional peptidomics of defensive skin secretion, Biochimie. 2008 Oct;90(10):1435-41. Doi
5. Ran Wang, Tianbao Chenb, Mei Zhoub, Lei Wangb, Chris Shawb, PsT-1: A new tryptophyllin peptide from the skin secretion of Waxy Monkey Leaf Frog, Phyllomedusa sauvagei, Regulatory Peptides, Volume 184, 10 June 2013, p. 14–21
6. José Roberto S.A. Leitea, b, Luciano P. Silvac, Maria Izabel S. Rodriguesa, Maura V. Pratesa, Guilherme D. Branda, Bruno M. Lacavac, Ricardo B. Azevedoc, Anamélia L. Boccad, Sergio Albuquerquee, Carlos Bloch Jr.a, f, Phylloseptins: a novel class of anti-bacterial and anti-protozoan peptides from the Phyllomedusa genus, Peptides, Volume 26, Issue 4, April 2005, p. 565–573